Chapitre 21

Clara,

Ça y est ce soir on pourra sortir, mais pour aller où ? Où est-ce que je vais aller ? Comment ça va se passer et comment ça va se terminer cette histoire ? C'est une affaire à suivre. Pour le moment, il me suffit de regarder les oiseaux par la fenêtre pour être libre et m'envoler avec eux mais je sais que c'est plus compliqué que ça. J'ai été faible, trop faible, je ne compte même plus le nombre de fois où j'ai fait des malaises durant les trois derniers jours. Je crois que ça m'a fait grandir, mûrir. C'est pas allongée par terre que mes problèmes vont se résoudre. Je ne suis pas seule, je ne suis plus seule je dois me protéger mais plus seulement. Ma carapace est formé, j'ai appris de mes erreurs et je ne me ferais plus avoir. Je sais maintenant qu'il y a des choses qu'il faut dire et d'autre qu'il faut cacher. L'infirmière m'a dit que mes yeux changent de couleur et qu'ils sont de plus en plus gris. Ça me plaît le gris, comme le fer ou l'acier. Mes yeux montrent que je suis résignée et que j'ai changé. Je ne suis plus la petite fille de la semaine dernière mais plutôt une fille qui n'a pas ou du moins qui n'a plus froid aux yeux.

J’entends frapper à la porte.

Clara – Entrez !

Thibault – C'est moi …

Clara – Thibault ! J'ai l'impression qu'on ne s'est pas vu depuis une éternité !

Thibault – Seulement depuis hier ! Alors dit moi : comment tu te sens ?

Clara – En forme. Je peux seulement te demander quelque chose ?

Thibault – Tout ce que tu veux !

Clara – Je voulais seulement te dire que je ne me sens pas encore prête pour te parler de ce qu'il s'est passé avant « l'enlèvement », je sais que tu as le droit de savoir mais c'est trop frais pour en parler.

Thibault – Tu sais bien, c'est pas un problème. Je ne t'aurais pas posé de questions, on ira au rythme que tu voudras. Tu sais que je suis là pour toi.

Clara – Ne change pas, reste toi, c'est tout ce que je te demande. Je suis là pour toi aussi parce que je vais bien et j'ai l'habitude de vivre des situations compliqués et je pense que tu peux avoir besoin de parler.

Thibault – Merci. Et descend de ta fenêtre pour venir dans mes bras !

Clara – Si tu me prend par les sentiments !

C'est vrai que c'est bon d'avoir quelqu'un à qui parler, quelqu'un pour vous rassurer et pour vous épauler. C'est une épreuve difficile et si nous voulons garder la tête haute et de l'espoir, on
devra se battre, ensemble.

Thibault s'approche de la fenêtre, il sent mon regard, se détourne et me souris. Mais je vois bien que se sourire cache un cœur lourd, je sais qu'il s'inquiète pour sa famille, pour la suite de l’enquête. Je sais aussi qu'il s'inquiète pour moi  et qu'il essaie de taire sa douleur mais son regard est lourd en souffrance. Je m'approche alors à mon tour de la fenêtre pour lui prendre la main. Pour lui montrer que je suis là. Il détourne le regard, rien qu'une seconde mais assez longtemps pour que je puisse voir une larme rouler sur sa joue, il l'essuie du revers de la main mais une autre glisse encore. Je le serre contre moi, pour ne plus voir ces larmes, des larmes qui me prouve que ce que je vis est bien réel. Je me dégage pour le laisser être seul mais à ma grande surprise c'est lui qui me retient par la main pour m'attirer vers lui. Et c'est tout naturellement que nos lèvres se rejoignent, comme  pour unir notre détresse.